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22 juin 2013

Article de Raïssa Blankoff sur "Un si long voyage"

Article paru en 2007

« Le bonheur c’est simple comme de voir ma fille Léa manger une tomate ». 
 
« J’avais pris le parti de me dire que la seule issue était la guérison ». Laurence écrit cette phrase au moment où Léa, sa fille de deux ans et demi, atteinte d’un cancer des reins, commence sa première séance de chimiothérapie. C’est le début d’ « Un si long voyage », 122 pages qui racontent à cœur et à cri six ans de guerre contre le cancer : à deux ans et demi : chimiothérapie de plusieurs mois ; à trois ans et demi : très lourde opération ; à six ans : trois séances de dialyse par semaine ; à sept ans : greffe d’un rein  « Ceci pour « l’anecdote » », écrit Max Meynier qui a préfacé le livre. Six ans d’enfer au quotidien.  
 
Aujourd’hui, la jolie Léa a 13 ans et demi : depuis trois ans, elle fait du hip hop et a développé un magnifique don pour le dessin. En 4ème de collège, elle fait rire ses camarades, meneuse et boute-en-train. C’est une jeune fille qui prend soin d’elle et de son greffon. Elle ne sait pas encore si, quand elle sera grande, elle sera actrice ou styliste.
 
Il y a, d’une part, le livre : vous allez pleurer, vous allez vous révolter, vous allez espérer un happy end. Vous irez même peut-être lire la fin avant parce que c’est trop difficile à supporter. Qu’à cela ne tienne.
Et d’autre part, il y a la parole de Laurence, qui a pris un peu d’âge, un peu de distance, un peu de repos, détentrice d’un savoir qu’elle aimerait partager pour aider d’autres familles touchées par la maladie de leur enfant.
 
« J’ai le souvenir d’avoir été rongée par l’impuissance et la culpabilité et à cela, il n’y a qu’une solution : accepter. En d’autres termes, s’autoriser à penser : « je me sens coupable, je me sens impuissante ». Accepter son incapacité à faire face à certains moments.
 
Et surtout ne pas rester seul et se faire aider : par exemple, pour ceux qui ont la foi, elle peut être d’un grand secours ; ce n’était pas mon cas, mais j’ai été heureusement soutenue par de merveilleux  psychologues. Un jour, un peu par hasard, j’ai été entendue par une femme lama, cette rencontre a été déterminante dans ma façon de ressentir et vivre ma souffrance : j’étais tellement persuadée que ma fille vivait un martyre, que je souffrais comme une folle sans me rendre compte que je lui imposais une souffrance en plus, inutile, la mienne. J’ai petit à petit appris la compassion : être avec celui qui souffre mais ne pas souffrir à sa place. C’est très difficile quand il s’agit de son propre enfant, mais quand on comprend qu’on peut l’aider ainsi, on y arrive.
 
Il est également capital de lâcher-prise : quand ma fille est entrée à l’hôpital, j’ai eu le sentiment d’être brutalement dépossédée de mon rôle de mère, les infirmières prenaient ma place. Je voulais tout porter moi-même, alors qu’il est impératif de faire confiance à d’autres personnes. Comme c’était mon enfant, j’avais l’impression que j’étais la seule à pouvoir la sortir de là, d’où mon omniprésence. Pourtant il est vital de se préserver : j’ai fini par accepter de la laisser en d’autres mains, le papa, la mamie, de m’octroyer du temps libre, de faire de l’équitation, d’aller déjeuner avec des copines. Y parvenir, c’est bon pour soi-même et pour l’enfant.
 
Je ne dirai jamais assez combien il est important de dialoguer avec le personnel médical. Ne pas se laisser impressionner par l’organisation « inhospitalière », oser des phrases comme : « J’ai envie de vous parler, j’ai le sentiment que ça ne va pas quand vous faites ceci ou cela. »
Ma fille était trop petite pour parler, mais ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas être à son écoute ! Si le message ne passe pas avec un médecin, allez en voir un autre. Ecrivez vos questions avant les rendez-vous, n’hésitez pas à noter les réponses, même pendant la consultation. 
 
Faites tout pour rester vivant à l’hôpital ! Et vous-même, expliquez tout à votre enfant, quel que soit son âge, faites-le participer aux soins s’il le désire, tenir la Bétadine, appuyer sur la compresse, enlever un petit pansement. D’ailleurs, je voudrais implorer les laboratoires pharmaceutiques pour qu’ils fassent des médicaments adaptés : vous ne pouvez imaginer le calvaire de devoir se battre plusieurs fois par jour pendant des années pour faire avaler des médicaments imbuvables, des gélules énormes aux enfants. La relation entre l’enfant et la famille est sans cesse perturbée par ce stress. Là-dessus, on peut agir ! Il est grand temps également de prendre en charge la douleur de l’enfant. Il y aurait tant à dire encore sur la dialyse et le don d’organe… »
 
Si vous dites à Laurence ou à Léa qu’elles ont eu beaucoup de courage, elles répondront sans doute : « non, nous étions les soldats d’une guerre et nous n’avons pas eu le choix. Mais nous avons gagné. »
 
 
Raïssa Blankoff
www.lagrandesante.com
www.santeglobale-paris15.com
www.naturoparis.com
France Inter 
Partout ailleurs et 3D 
pièce 804 
116 avenue du Président-Kennedy
75220 Paris cedex 16  
 



 


 





 



3 commentaires:

Monique Douillet a dit…

Je reste muette. Je me dis que ce n'est pas possible, que ce doit être une fiction, que cette Laurence que j'ai vue, frêle et vive, n'a pas pu porter cela et surmonter.
Mais si... je commence à me faire à l'idée. Alors quand elle parle du bonheur, du sien et de celui de Léa, on peut la croire.
Comment peut-on se procurer le livre ?

Monique Douillet a dit…

Je reste muette. Je me dis que ce n'est pas possible, que ce doit être une fiction, que cette Laurence que j'ai vue, frêle et vive, n'a pas pu porter cela et surmonter.
Mais si... je commence à me faire à l'idée. Alors quand elle parle du bonheur, du sien et de celui de Léa, on peut la croire.
Comment peut-on se procurer le livre ?

Laurence a dit…

Sur www.edilivre.com .
Très touchée par ton commentaire. Très émue aussi. Merci Monique.