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25 octobre 2013

Hymne à la créativité


Que sais-tu de l’artiste qui ne peut s’exprimer ?
Que sais-tu de l’enfant riche de ses talents,
Dont chaque démonstration est aussitôt huée ?
Humilié et raillé, coupé dans ses élans,
Il pose sur son chagrin le manteau de l’oubli,
Amnésie obligée mais qui anéantit.

Alors il ne sait plus ce qu’il sait si bien faire,
Ce qui le rend heureux, ce qui le rendrait fier.
Tel un petit soldat marchant toujours bien droit,
Il est triste en dedans sans trop savoir pourquoi,
Ne sait plus sautiller, ni faire des entrechats,
Il est sage dans le rang, ne fait aucun dégât.

Le dessein de sa vie fut décidé un jour,
Par de mauvais esprits rodant aux alentours,
Penchés sur son berceau avec pour seule promesse,
L’assurance, sans espoir, d’une pauvre vie sans liesse.
Il fera donc semblant et masquera sa peur,
Il suivra l’ordonnance, et taira sa douleur.

Ne rien laisser paraître, oublier cette flamme
Qui s’éteint peu à peu, aller la mort dans l’âme
Sur cette route toute tracée et dont il n’a que faire.
Quelle est cette duperie, pourquoi ce goût amer ? 
Qui a détruit en lui, le joyeux, le vivant ?
Qui a fait de l’enfant ce  clown pantelant ?

Quel est cet assassin qu’on le juge, le condamne,
Pour cet acte cruel, cette manigance infâme !
Et quels sont les témoins qui nient avoir tout vu,
Ont passé leur chemin, et se sont toujours tus ?
Que faut-il dans la vie pour pouvoir s’en remettre ?
Quelle est donc l’antidote pour ranimer son être ?

Quelle passerelle vers l’enfant mort depuis si longtemps ?
Un regard, un sourire, une main qui se tend ?
Des pinceaux, de la terre, des crayons, une feuille blanche,
Et la cage s’entrouvre, c’est l’heure de la revanche.
L’enfant reprend ses droits autrefois si bafoués,
Il s’arme de sa joie, et fait un pied de nez.

Il jette sur la toile mille et une couleurs !
Ça remplit toute son âme, ça ravive la chaleur !
Et il rit et il pleure, et il rit et il pleure,
Pour rattraper le temps où régnait la terreur !
Il casse alors l’armure imposée, si serrée,
Il se sent fort soudain,  violent et déchaîné !

Ça craque de partout et puis soudain explose !
Tout ce charivari c’est la métamorphose !
Il respire un grand coup à en perdre la tête !
Ça bouillonne en dedans, ça gronde, ça rote, ça pète,
Tous ses organes vibrent, la machine est en route
Ça expulse en dehors, ça n’a plus aucun doute !

Ça s’exprime bruyamment, c’est joyeux !  C’est vivant !
Et l’âme du poète rejoint celle de l’enfant !

Que sais-tu de l’artiste à jamais muselé ?

Laurence Berthault
1er octobre 2013

  
 

 

Peinture de Léa Prud'homme inspirée par ce poème

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