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23 janvier 2019

Cerveau embrumé



Cerveau embrumé et maitre à bord. Il décide de ce que je peux mémoriser et de ce que je dois laisser de coté. Pour se protéger. Il a failli être détruit. Non pas par un AVC ou autre maladie soudaine, mais par trop de stress accumulé sur de nombreuses années. C’est le stress chronique. Ça a fusillé ses neurones. Sensation d’un grésillement, décharges électriques dans tout son espace. J’étais sur mon lieu de travail lorsque c’est arrivé. Depuis plusieurs mois, je mémorisais tout ce qui concernait les dossiers en cours pour pallier au manque de personnel. J’engrangeais tellement de données que cela a provoqué la surchauffe sous mon crâne. Je suis rentrée chez moi après cet épisode étrange, sensation douloureuse dans ma tête,  j’ai dormi toute la nuit. Au réveil, j’étais dans l’incapacité de me lever. Mon corps ne répondait plus. Le réveil avait sonné, le mouvement habituel qui consiste à se mouvoir pour se mettre debout, ce mouvement répété chaque matin, m’était impossible. Qui de mon corps ou de mon cerveau était en panne ? …


C’était il y a quatre ans. Aujourd’hui je suis l’obligée de ma substance grise. Je lui demande de mémoriser une histoire que l’on vient de me raconter, ou le résumé d’un documentaire qui m’a intéressé,  elle décide si cela en vaut la peine ou non. Je m’incline. Mon cerveau fait le tri. Les évènements sans intérêts pour lui passent à la trappe. Il fait le minimum syndical. Je n’ai pas le choix. Il a dû élaguer des tas d’infos enregistrées depuis des années à commencer par tout ce qui était en lien avec mon dernier travail. Celui pour lequel j’ai sombré et qui m’a laissée sur le carreau. Physiquement et mentalement. Cela s’appelle un épuisement professionnel. Je n’ai pas fait de dépression. Le fait d’être assurée de ne plus retourner sur le lieu du « crime », me redonna le moral. Mon état physique me préoccupa d’avantage, la perte d’énergie, l’incapacité à me mouvoir furent très difficile à comprendre, à accepter. Quinze jours d’arrêt auraient dû me permettre de repartir. Du moins c’est ce que j’imaginais. Erreur totale. Ce fut long, très long. C’est comme un tsunami qui ravage le corps et la tête, les laissant affalés sur le sable sans la force de se lever et de repartir.

Quatre ans après, je note scrupuleusement tout : les rendez-vous sur l’agenda que je relis plusieurs fois par jour pour être sûre d’en oublier aucun, les courses ou choses à faire, je suis la reine des listes.

Je ne peux plus travailler. J’étudie chez moi en lisant. Une heure maximum à la fois. Au-delà je ne comprends plus les mots lus. J’ai un rythme lent. J’étais hyperactive et perfectionniste. J’ai usé toutes mes cartouches. Petit à petit j’apprends à faire les choses différemment d’avant. J’accepte cela. C’est comme si j’étais entrée d’un coup dans la vieillesse. Avec, par instant, des petits sursauts d’énergie.

Mon cerveau est le gardien dans le brouillard de mes pensées.


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