Louise devait avoir huit ans.
C’était l’été.
En vacances dans la grande maison de ses arrière-grands-parents. Non loin de l’océan. Lieu paradisiaque de son enfance.
C’était l’été.
En vacances dans la grande maison de ses arrière-grands-parents. Non loin de l’océan. Lieu paradisiaque de son enfance.
Tous les ans, ce rendez-vous familial lui procurait un
bien-être immense. Elle y ressentait, à chaque fois, un sentiment profond de
sécurité, comme si les murs de cette villa la prenaient dans leurs bras,
l’entourant et la protégeant de tout danger. Tendre cocon ouaté.
Posée majestueusement en surplomb de la rue, la bâtisse
était imposante. Et belle.
Construite au début du vingtième siècle, quand ses aïeux
avaient encore les moyens d’une vie luxueuse, elle était fière et debout malgré
les bombardements de la seconde guerre. Elle avait été épargnée.
Ce qui fascinait toujours la petite fille, malgré sa
connaissance totale de la maison et de ses moindres recoins, c’était
l’impression magique de vivre dans un lieu à la fois familier et féérique.
Multiples escaliers, multiples couloirs, multiples chambres, multiples terrasses
et balcons. Tonnelle et pergola, petits chemins montants et descendants autour
de la villa, rez-de-jardin avec buanderie, lavoir et douche, deux grands
garages, des toilettes partout, un au sous-sol, un au rez-de-chaussée, trois à
l’étage, un autre tout en haut dans l’appartement terrasse réservé au
« fils ». Des petits cabinets de toilettes dans toutes les chambres où
se logeaient un lavabo et même parfois un bidet. Des salles de bain à tous les
étages. Un confort inouï pour l’époque où cela fut construit.
Cette maison semblait avoir été conçue afin que quiconque y
pose ses valises, s’y sente immédiatement chez lui, pouvant faire ses ablutions
dans l’intimité de sa chambre tout en participant, à l’heure des repas, à la
vie commune, bruyante et joyeuse.
Cet été-là, une nouvelle cuisinière avait pris ses
fonctions. Plus jeune que celle de l’an passé, partie à la retraite après plus
de vingt ans de bons et loyaux services auprès des hôtes de la villa. Bien
qu’il fût très mal vu que les enfants dérangent le personnel dans son travail,
Louise passait outre. Son arrière-grand-mère était adorable, et c’était plutôt
un jeu de défier les consignes.
Elle lui tendit l’objet qui avait retrouvé sa forme
initiale.
« A toi ! »
L’enfant s’en empara, glissa le fil entre ses doigts, n’y
arriva pas du premier coup mais elle insista. Au bout de quelques tentatives, à
sa plus grande joie, la tour Eiffel apparut entre ses deux mains tendues, face
à face.
« Demain, je te montrerai comment faire le pantalon …
et la tasse si on a le temps ! »
Louise était si heureuse ! On pouvait la voir déambuler
dans les grands couloirs, bras tendus devant elle, ses doigts s’agitant pour
attraper le bout de ficelle lui donnant toutes sortes de formes. A la fin de
l’été la ficelle n’avait plus de secret pour elle.
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